Jean-Charles Hue

par Mathilde Villeneuve

Dieu marche entre les marmites1

 

Il l’emparouille et l’endosque contre terre ;

Il le rague et le roupète jusqu’à son drale ;

Il le pratèle et le libucque et lui baroufle les ouillais ;

Il le tocarde et le marmine,

Le manage rape à ri et ripe à ra.

Enfin il l’écorcobalisse.

L’autre hésite, s’espudrine, se défaisse, se torse et se ruine.

C’en sera bientôt fini de lui ;

Il se reprise et s’emmargine… mais en vain

Le cerceau tombe qui a tant roulé.

Abrah ! Abrah ! Abrah !

Le pied a failli !

Le bras a cassé !

Le sang a coulé !

Fouille, fouille, fouille,

dans la marmite de son ventre est un grand secret

[…]

Henri Michaux, Qui je fus, p.231, nrf, poésie, Gallimard, 2000.

Jean−Charles Hue Pitbull Carnaval, 2006. Vidéo, 34 min. 12 s. Courtsey l’artiste / the artist & galerie Michel Rein, Paris.

 

 

Beauté cruelle

 

Cet extrait de poème d’Henri Michaux semble évoquer les scènes de combat des films de Jean-Charles Hue. Tel le poète barbare qui conserve les nerfs à vif pour cingler la langue, le cinéaste porte à l’écran les gestes et les mots tonitruants des autres. Parce que leur crudité est gage de la vivacité de ses personnages, Hue dirige sa caméra au plus près des corps et de leurs surfaces usées, se met à l’écoute des croyances contradictoires et des paroles embrumées, d’où surgit par moments une pensée extralucide. Et à travers son regard, chargé d’empathie, finit par décentrer et gagner la nôtre.

Contrairement à une tradition documentariste qui, pour gagner en objectivité, refuse le sujet, et avec lui le point de vue et l’espace de projection qu’il offre, les vidéos et films de Jean-Charles Hue s’élaborent autour de personnages. Cherchant à extraire la sève de situations grégaires et primitives, l’artiste-cinéaste embarque le spectateur dans des endroits pour la plupart réfractaires aux non-inités : combats de chien, lieux de consommation de drogue, campements de communauté Yéniche… L’image est à Hue ce que la page est à Michaux : le dehors de l’espace du dedans. Les scènes se passent souvent à huis clos, les secrets sont révélés dans les espaces exigus d’une chambre ou d’une voiture. Malgré la grande proximité physique et spirituelle qu’il partage avec ses interlocuteurs, le cinéaste ne tolère aucune forme de spectaculaire et coupera volontiers au montage ceux qui auraient trop cherché à impressionner sa pellicule… À la manière des tableaux de Bruegel qui montrent l’envers du décor, il opte pour une vision mixte et décloisonnée de la vie. Comme chez le peintre, les mondes sont denses, complexes et emmêlés. Les situations grotesques qu’il filme sont à ce point grouillantes qu’elles en débordent du cadre. Jamais un plan n’épuisera le réel, disait Mallarmé. Dans Tattoo Fight (2011), sa caméra se promène sur la peau de deux corps tatoués qui s’affrontent sur un rythme de blues vaudou (une Litanie des saints par Dr John). Il faut s’abîmer pour mieux vivre, explique l’artiste, qui revendique, à l’instar de ses personnages, le sacrifice originel.

Jean−Charles Hue Angel, 2009. Vidéo, 12 min. 08 s. David et Angela, 2009. Vidéo, 6 min. 02 s. Série Carne Viva, 2009. Courtsey l’artiste / the artist & galerie Michel Rein, Paris.

« Faire décoller la bidoche »2

 

Les trames narratives de Hue semblent procéder d’un « effet koulechov »3, d’une contamination sémantique des images entre elles. Dans Pitbull Carnaval, film tourné au Mexique, l’image passe nonchalamment du témoignage du couple passionné par les combats de chien aux caresses à l’animal et à la violence des luttes bestiales. Dans El Puma (2009), après avoir enregistré les propos du maire de Tijuana (qui proclame que parmi ses 29 000 animaux, celui qu’il préfère, c’est sa femme !),  la caméra glisse sous la jupe d’une fille, avant de rendre les corps écartelés des taureaux de la corrida grâce à l’effet mystique d’une image surexposée, digne d’une peinture de Rembrandt. Tout se passe comme si Hue tentait d’accompagner (et de comprendre) par l’image la religion professée par ses personnages. Un chien blanc, fantôme énigmatique qui traverse tel un leitmotiv plusieurs de ses films, donne forme à l’invisible. Il incarne dans Un Ange (2005) l’expérience mystique qui marque un tournant décisif dans la vie de Fred, le « chouraveur ». Poursuivant sa logique de l’inter-monde, c’est un couteau à la main que Hue part à la rencontre des personnes qu’il filmera au Mexique. Taillé dans un os de chien, l’objet est la métaphore idéale de la réincarnation. Arme menaçante, il est aussi l’objet de médiation entre lui et les autres, déclencheur du dialogue et fil conducteur entre ses films. Tantôt dessiné sur les murs d’un motel, il se retrouve suspendu au milieu d’une ronde dansante, ou encore objet érotique qui se pose délicatement sur les lèvres d’une femme tandis qu’elle confie à son masseur-marabout ses troubles sexuels oniriques.

Jean−Charles Hue La BM du Seigneur, 2011. Production / Produced by Capricci / Avalon

 

 

La construction d’une disponibilité

 

Contre une fiction trop éloignée du sentiment de réalité, forgée par une construction artificielle et une vision programmatique, Hue a fait le choix d’une forme documentaire, mais cette forme, il la perçoit comme un endroit paradoxal où créer les conditions d’apparition de situations naturelles. Cherchant la fenêtre de tir, il n’hésite pas à aller « là où ça cogne ». Au risque d’y passer même, lorsqu’un soir, le revolver de son ami Fred se retourne inopinément vers la caméra, qui immortalise le tracé de la balle, avant qu’elle ne dévie de son axe pour éviter le trou noir. Y’a plus d’os. La réalité à fleur de peau. Qui ne peut être contenue dans le champ de la représentation. Cette disponibilité capable de capturer l’intempestivité du réel, l’artiste la construit en s’immergeant dans la communauté qu’il souhaite filmer. Celle par exemple de la famille yéniche qu’il fréquente pendant une dizaine d’années, au point d’en devenir le fils adoptif. Au point aussi, que la caméra devienne un objet familier et que les acteurs parviennent avec un naturel surprenant à rejouer leur propre rôle. Sûrement parce que l’artiste leur permet de s’accaparer l’outil, de devenir les interprètes de leur vie cinématographique et non simplement des objets de curiosité qui se laisseraient enregistrer par l’objectif. La caméra est surnommée la « poukaveuse » par Fred, parce qu’elle « bave » leur image.

Avec La BM du seigneur, Hue met en scène ce qui est déjà apparu dans ses premières vidéos documentaires. La fiction s’annonce comme un deuxième temps du documentaire, voire sa représentation. Passant inopinément d’un genre à l’autre, l’artiste semble résoudre un problème qui hante pourtant toute l’histoire du cinéma documentaire : celle de la légitimité du montage et du « faire rejouer ». Il redonne ainsi ses lettres de noblesse à la « reprise », au sens de « revenir en arrière pour recommencer » mais aussi de tisser le raccord entre les éléments filmés. Son cinéma trouve la distance juste entre le film et son milieu d’inscription, les personnages vivants et ceux portés à l’écran. Si, à l’intérieur de la situation filmée, le cinéaste fait en général l’expérience délicate d’une diffraction temporelle tenant le rôle de l’artificier en même temps que celui de l’enregistreur instantané, Hue garde l’équilibre. À la fois hors et dans le champ de la représentation, il ne refuse pas de rentrer en relation avec son interlocuteur mais reste physiquement absent de l’image. Pour reprendre les mots de Depardon « filmer n’est pas surveiller ce qui se passe dans l’oeilleton de la caméra. C’est, tout au contraire, être présent à ce que l’on filme »4, être sensible à la présence des personnages filmés et installer une qualité de présence. Dans Quoi de neuf docteur (2003), il tient la place du passager dans la voiture à qui le conducteur enjoint de baisser son objectif, pour éviter de se faire arrêter par les policiers. « Les schmidts de tous ces morts, s’il m’arrête j’suis obligé de le percuter… », car ce dernier n’a pas son permis. La caméra devient un objet suspect, obligée de se retirer pour que la réalité n’en soit impactée.

Jean−Charles Hue La BM du Seigneur, 2011. Production / Produced by Capricci / Avalon

 

 

On sait depuis Rouch et Les maîtres fous que la caméra est agissante, qu’elle a le pouvoir de convoquer et d’influer sur le réel. On sait que le moment du tournage est un moment de vie qui influe sur le film produit. On a vu Chronique d’un été chercher à révéler en direct le pouvoir d’intimidation de la caméra. On croit, avec le philosophe François Niney que « la fiction ne doit pas mettre entre parenthèses le réel où il s’inscrit, qu’il détoure et retrace en même temps. »5 Chez Hue, ce constat est poignant. Le film est monté dans l’interaction du filmage et du filmé. Alors, quand le cinéaste s’inquiète de voler l’image de ses compagnons sans rien donner en retour, on se dit que c’est sûrement la touche d’humilité qui confère à son travail sa patte majestueuse. Car il oublie que l’image, il ne la prend pas, il leur donne. À qui perd gagne.

 

1 Le titre est une reprise libre d’une citation de Sainte Thérèse D’Avila « Comprenez que si c’est à la cuisine, le     Seigneur circule parmi les marmites », Livre des fondations, 1577.

2 Toutes les citations sont issues d’un entretien avec l’artiste réalisé en juin 2011.

3 Lev Koulechov, cinéaste et théoricien russe, a dirigé à partir de 1920 l’école de cinéma de Moscou, le VGIK, où il a créé un laboratoire d’expérimentation du montage pour en proposer deux types : le montage réflexe qui influe sur les sentiments — montage de plan compris dans le déroulement logique de l’action — et le montage des attractions qui va provoquer l’apparition d’une idée, jouer avec l’intellect. On assiste par là au dépassement du déroulement logique de l’action par une collision de deux plans de natures différentes. Ces montages ont notamment été utilisés par Eisenstein.

4 dans Le Documentaire, Jean Breschand, les petits cahiers, Cahiers du cinéma, Scérén-CNDP, 2002, p. 77.

5 François Niney, Épreuve du réel à l’écran, De Boeck, 2002, p 312.

 

“God walks among the pots and pans”1

 

He grabowerates him and grabacks him to the ground;

He rads him and rabarts him to his drat;

He braddles him and lippucks him and prooks his bawdles;

He tackreds him and marmeens him

Mandles him rasp by rip and risp by rap.

And he deskinnibilizes him at the end.

 

The other hesitates; he is bittucked, unapsed, torsed and ruined.

He’ll be done for soon.

He mendles and marginates himself… but in vain,

The far-rolling hoop falls down.

Abrah! Abrah! Abrah!

The foot has failed!

The arm has broke!

The blood has flowed!

Gouge, gouge, gouge,

In the big pot of his belly there’s a great secret

[…]

Henri Michaux, excerpt from “The Big Fight”, Who I Was, Darkness Moves: An Henri Michaux Anthology, 1927-1984, selected, translated and presented by David Ball, University of California Press, 1994.

Jean−Charles Hue La BM du Seigneur, 2011. Production / Produced by Capricci / Avalon

Cruel Beauty

These lines from a poem by Henri Michaux seem to conjure up the fight scenes in Jean-Charles Hue’s films. Like the barbarian poet who remains a bundle of nerves, the better to lash language, the film-maker brings to the screen the gestures and the stentorian words of others. Because their rough-and-readiness is a pledge of his characters’vivaciousness, Hue aims his camera as close as possible at their bodies and their well-worn surfaces, and lends an ear to contradictory beliefs and hazy words, from which, at moments, there surges some extra-lucid thought. And through the way he sees things, through his empathy-filled eye, our own ends up being off-centered, and winning.

Unlike a documentarist tradition which, to gain objectivity, refuses the subject and, with it, the viewpoint and spatial projection that it offers, Jean-Charles Hue’s videos and films are developed around characters. In trying to extract the sap from gregarious and primitive situations, the artist-cum-film-maker takes viewers into places which are for the most part not exactly the non-initiated’s cup of tea: dog fights, places where drugs are consumed, Yeniche (i.e., loosely, Gypsy) community camps… The image for Hue is what the page is for Michaux: the outside of the inside space. The scenes often take place behind closed doors, and secrets are revealed in the cramped quarters of a bedroom or a car. Despite the great physical and spiritual closeness he shares with his interlocutors, the film-maker does not put up with any form of spectacularness and, when it is time for the editing, would readily cut out anyone who has striven too hard to impress his film… Rather like Bruegel pictures which show the flipside of the décor, Hue opts for a mixed and decompartmentalized vision of life. As with the Flemish painter’s works, Hue’s worlds are dense, complex and intertwines. The grotesque situations which he films are so teeming that they spill over beyond the frame. Never, quoth Mallarmé, will a shot exhaust reality. In Tattoo Fight (2011), his camera wanders over the skin of two tattoo’d bodies confronting each other accompanied by a voodoo blues beat (a Litany of the Saints by Doctor John). As the artist himself puts it, the better to live, you have to damage yourself, and like his characters, the artist also lays claim to the original sacrifice.

“Silk from a sow’s ear”

Hue’s narrative plots seem to issue from a “Kuleshov effect”3, a semantic contamination of images between each other. In Pitbull Carnival, a film shot in Mexico, the image shifts casually from the words of the couple with a passion for dog fights to caressing the animal and the violence of animal combat. In El Puma (2009), after recording the ideas of the mayor of Tijuana (who proclaims that among his 29,000 animals, the one he prefers is his wife!), the camera slides beneath a girl’s skirt, before depicting the quartered bodies of bulls at the corrida, thanks to the mystical effect of an over-exposed image, worthy of a Rembrandt painting. Everything comes about as if Hue were trying to accompany (and understand), through imagery, the religion being professed by his characters. A white dog, an enigmatic ghost who passes through several of his films, like a leitmotiv, lends shape to the invisible. In Un Ange (2005) it incarnates the mystical experience which marks a turning-point in Fred the “pilferer’s” life. Pursuing his inter-world logic, Hue sets out, knife in hand, to meet people whom he will film in Mexico. Carved from a canine bone, the object is the ideal metaphor of reincarnation. It is a threatening object, but also the go-between thing between him and the others, triggering dialogue and a main thread between his films. At times drawn on the walls of a motel, it ends up hanging from the middle of a dancing ring, or alternatively like some erotic object coming delicately to rest on a woman’s lips, while she tells her masseur-cum-witchdoctor about her dreamlike sexual problems.

The Construction of an Availability

Working against a fiction that is too far removed from the sense of reality, fashioned by an artificial construction and a programmatic vision, Hue has opted for a documentary form, but he sees this form like a paradoxical place in which to create the conditions for natural situations to appear. Looking for the launch window, he does not shrink from going “precisely where it hits”. At the risk of even passing there, when, one night, his friend Fred’s revolver turns unexpectedly towards the camera, which immortalizes the bullet’s path, before it swerves from its axis to avoid the black hole. Y’a plus d’os (There’s no more bone). Reality just beneath the skin. Which cannot be contained within the field of representation. This availability, capable of capturing the untimeliness of reality, has been constructed by the artist by the way he delves into the community which he wants to film. The community, for example, of the Yeniche family he sees over a period of ten years or so, to the point of becoming their adopted son. To the point, too, where the camera becomes a familiar thing and, with surprising naturalness, the actors manage to re-enact their own parts. Surely because the artist allows them to take possession of the tool, and become the interpreters and players of their cinematographic lives, and not merely objects of curiosity letting themselves be recorded by the lens. The camera is nicknamed the “poukaveuse” by Fred, because it “drools” their image.

With La BM du seigneur, Hue presents what already appeared in his early documentary films. The fiction is announced as a second tempo of the documentary, not to say its representation. Moving unexpectedly from one genre to the other, the artist seems to solve a problem that nevertheless haunts the whole history of documentary cinema: the issue of the legitimacy of editing and “re-enactment”. He thus provides a pedigree for the “remake”, in the sense of  “reverting back to start all over again”, but also of weaving the connection between the elements filmed. His cinema finds the right distance between the film itself and the environment it is part and parcel of, the living characters and those brought to the screen. Within the filmed situation, the film-maker may, in a general way, undergo the delicate experience of a temporal diffraction playing the role of trick-maker at the same time as the role of instant recorder, but Hue keeps his balance. Both outside and inside the field of representation, he does not refuse to have a relationship with his interlocutor, but he remains physically absent from the image. Filming does not mean keeping an eye on what happens in the camera’s spyhole, but being present at what is being filmed, being aware of the presence of the characters being filmed, and introducing a quality of presence. In Quoi de neuf docteur ?(What’s Up, Doc?) (2003), he takes the place of the passenger in the car whom the driver asks to lower his lens, to avoid being stopped by the police. “The cops of all these dead people, if he stops me, I have to run him down…” because the driver does not have his licence. The camera becomes a suspect object, forced to withdraw so that reality is not affected.

Ever since Rouch and Les maîtres fous, we know that the camera is something active, that it has the power to summon up and influence reality. We know that the moment of filming is a moment of life which has an effect on the film produced. We have seen Chronique d’un été trying to show, live, the camera’s powers of intimidation. Together with the philosopher François Niney, we believe that “fiction should not put into brackets the reality of which it is part, which it cuts out and redraws at the same time.”4 With Hue, this is a poignant observation. The film is edited in the interaction between filming and filmed. So when the film-maker worries about stealing the image of his companions without giving anything back, we say to ourselves that this is undoubtedly the touch of humility which lends his work its majestic aspect. Because he forgets that he is not taking the image, but giving it to them. The loser wins.

 

1 The title is freely borrowed from words of St. Teresa of Avila: “Understand that if it be the kitchen, the Lord walks among the pots and pans”, The Book of Foundations, 1577.

2 All the quotations are from an interview with the artist conducted in June 2011.

3 From 1920 on, the Russian film-maker and theoretician Lev Kuleshov headed the Moscow film school, the VGIK, where he set up an experimental editing laboratory, based on two types: reflex editing which influences the feelings — shot editing included in the plot’s logical unfolding — and attraction editing, giving rise to the appearance of an idea, and playing with the intellect. Thereby, we go beyond the plot’s logical development through a collision of two different shots. These types of editing were, in particular, used by Eisenstein.

4 François Niney, Épreuve du réel à l’écran, De Boeck, 2002, p 312.

 


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