"Voyage Voyage", Pour une République des rêves de Gilles A. Tiberghien

par Mai Tran

Ce n’est pas sans raison que ces rêves d’antan reviennent aujourd’hui.

Aucun rêve, si absurde soit-il, ne se perd dans l’univers. Il y a en lui une faim de réalité, une aspiration qui engage la réalité, qui grandit et devient une reconnaissance de dette demandant à être payée. Bruno Schulz, extrait de La République des rêves, in La Boutique des cannelles, 1934

 

 

Troisième opus d’une poétique de l’imaginaire en mouvement (1), le catalogue de l’exposition au Crac Alsace Pour une République des rêves pensé par Gilles A. Tiberghien ponctue ce tout premier commissariat d’exposition (2) pour le philosophe. L’ouvrage explore de nouvelles modalités du genre éditorial, en articulant au sein des grands thèmes de l’exposition autant de chapitres qui accueillent poèmes d’auteurs, images des œuvres, textes et récits de voyages de Tiberghien. Déserts et montagnes, Cabinets de curiosités, Traversées, Forêts, Paysages, lignes, traces, Territoires imaginaires recréent un nouvel itinéraire le long de la fragile frontière entre réel et imaginaire, à l’instar de la nouvelle (3) de Bruno Schulz auquel le titre fait référence. Une pensée du voyage, laquelle, du Pérou à l’Inde, en passant par le Mexique, puis de Singapour à Bali, en Afrique ou encore en Tchécoslovaquie, se déplace de paysages désertiques en rencontres, de déambulations urbaines en notes de lectures, de visites de temples en spectacles de combats de coq. Une véritable invitation d’auteur à un ailleurs toujours plus prompt à envisager la réinvention de formes, d’écrivains ou d’artistes, mises ici en abyme de l’exposition. Cartographies, vues aériennes, océans, volcans, étendues neigeuses, horizons se déploient sur les pages de l’ouvrage, tel un album photo intime, image du voyage mental de l’écrivain à travers l’histoire de l’art contemporain, Richard Long, Robert Filliou, Gloria Friedman, accompagnés de la jeune génération Évariste Richer, Cyprien Gaillard, Raphaël Zarka… pour n’en citer que quelques-uns parmi la quarantaine d’artistes qui emplissent cette inédite poétique des voyages.

Couverture du livre "Pour une République des rêves" de Gilles A. Tiberghien

 

 

 

(1) avec Le Principe de l’axolotl & Suppléments (Actes Sud, 1998) et Finis terrae, imaginaires et imaginations cartographiques (Bayard, 2007)

(2) avec Sophie Kaplan

(3) La République des rêves, in La Boutique des cannelles, 1934, Gallimard, 2005

 

 

Gilles A. Tiberghien, Pour une République des rêves, 2011

Textes de Gilles A. Tiberghien, Pierre Alféri, Olivier Cadiot, Emmanuel Hocquard, Sophie Kaplan, Yannick Liron, Pascalle Monnier. Collection Œuvres en sociétés – Album, co-édition les presses du réel et Crac Alsace, édition française, 17 x 20 cm (relié), 192 pages (59 ill. coul. et n&b) , 20 euros. ISBN 978-2-84066-461-1

Catalogue de l’exposition, Pour une République des rêves, Crac Alsace, Altkirch, 15 juin-30 octobre 2011. Avec Silvia Bächli, Glen Baxter, Neal Beggs, Marilyn Bridges, Elina Brotherus, Balthasar Burkhard, Jean Clareboudt, Edith Dekyndt, Marcel Dinahet, Jimmie Durham, Robert Filliou, Thomas Flechtner, Gloria Friedmann, Joan Fontcuberta, Hamish Fulton, Cyprien Gaillard, Mario Giacomelli, Isabelle Krieg, Richard Long, Philippe Mayaux, Nadia Myre, Marylène Negro, Walter Niedermayr, Bernard Plossu, Anne & Patrick Poirier, Eric Poitevin, Hugues Reip, David Renaud, Robin Rhode, Évariste Richer, Ulrich Ruckriem, Hans Schabus, Roman Signer, David Tremlett, Su-Mei Tse, Holger Trülzsch, Catharina Van Eetvelde, Xavier Veilhan et Raphaël Zarka.


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